Bourland Fabrice, Hollywood Monsters, 10-18 Grands détectives, 15 janvier 2015
"En décembre 1938, Singleton et Trelawney goûtent un repos mérité sous le soleil de Hollywood, la capitale du septième art. Mais les vacances ne se déroulent pas comme prévu, et quand nos détectives tombent nez à nez, au milieu de la nuit, avec une créature semblant tout droit sortie d'un film d'épouvante, c'est à se demander si la fiction n'est pas devenue réalité. Vibrant hommage au cinéma d'avant-guerre, Hollywood Monsters nous plonge dans une Amérique lumineuse et cruelle, à l'heure où les " durs à cuir " apparaissent sur les écrans et où les politiques eugénistes sont appliquées avec une ardeur à faire froid dans le dos." (4e de couverture)
Attention…Coup de cœur dans la catégorie polar !!
J’étais (encore) en pleine phase Tod Browning (dont le film Freaks n’arrive pas à me lasser, je le mets encore très souvent en « toile de fond » lorsque je travaille) lorsqu’au détour d’un rayon, ce titre m’aguiche : Hollywood Monsters. Couverture tapageuse avec pin-up en robe rouge, détective à chapeau de feutre et silhouette clichée de loup-garou. Que dire si ce n’est que j’ai craqué lamentablement malgré mes résolutions ? Je vais peut-être passer pour une ignare, mais je n’avais jamais lu Bourland (erreur que je vais rattraper très vite !) raison de plus pour me laisser convaincre, il faut toujours faire de nouvelles expériences ! Enfin, par un lundi à l’humeur grise, j’entame…
Que dire, par où commencer ?
L’enquête d’abord. Lors des premières pages, j’ai immédiatement trouvé l’évolution de l’intrigue classique, lente. Mine blasée je me suis dit qu’il fallait continuer, au moins pour l’ambiance qui sent le tabac et les clubs tamisés d’un L.A. que je ne connais pas, pour les références cinématographiques aussi (une mine en ce domaine). Et je n’ai pas eu à regretter mon choix ! Rapidement, j’ai ravalé mes certitudes et découvert qu’il n’y a rien d’attendu là dedans. On va de surprise en imprévu et surtout, on pénètre l’univers fascinant de ceux que la nature a dotés d’un physique hors norme, ceux que l’on nomme parfois les freaks ! Je ne spoile pas, mais croyez moi, ce club, l’Angels Club, est juste absolument dingue, on y est, on est ahuri et on réalise qu’on se trouve au cœur d’une intrigue qui peut nous mener n’importe où. On comprend qu’il ne s’agit pas d’un simple meurtre de starlette par un type costumé…et ce n’est que le premier quart du livre !
À cela s’ajoute le fait que l’auteur évite avec brio l’écueil qui aurait misérablement gâché l’histoire puisque ces personnes à physique « hors-norme » sont traitées ici avec le respect qui leur est dû, avec un éclat qui ne les dénigre pas. Ils ne sont pas là pour assouvir une imagination malsaine, mais bel et bien pour récolter les hommages que l'on doit à leur beauté. Bourland place très justement à ce sujet quelques rappels sur la politique eugéniste menée alors, et leur rend une justice qu’ils méritent.
La « mise en scène » de l’auteur actionne fumigènes et lieux désertiques, grands halls d’hôtel et ruelles sombres, voiture dans le rétro et vieux garage en bordure de routes poussiéreuses…Bref, un voyage dans un décor de film, avec une histoire hors-norme. Hors-norme aussi de par les protagonistes qu’elle met en scène. On retrouve toute sorte d'individus: des passionnés, des fous, des physiques qui ne suivent aucune règle ! Avec ces interlocuteurs, une simple bagarre « à l’américaine », au milieu d’entrepôts désertiques, réserve des surprises que vous ne pouvez pas deviner ! On ira aussi jusque dans un vieil hôpital, et dans les cellules d’un château…le tout sans que rien ne nous paraisse impossible (même si je l’ai craint un instant) !
Un autre point très agréable, c’est le fait que l’auteur n’hésite pas à faire de nombreuses allusions au cinéma d’épouvante, l’histoire se déroule en 1938 et il y a matière ! Il n’hésite pas non plus à glisser entre les lignes quelques apparitions toujours crédibles : ainsi, on croise Bella Lugosi, Boris Karloff, Tod Browning, mais aussi Harry Earls, Olga Baclanova … je m’arrête, mais le livre est truffé de références! Cet ajout crée une ambiance, car immanquablement, on a tendance à situer l’histoire dans les décors de ces films, les protagonistes prennent le visage d’acteurs en noir et blanc. (Enfin, ce fut mon cas et ça a sans doute beaucoup contribué au plaisir que j’ai eu à le lire !)
L’autre atout de l’enquête, c’est de savoir répartir avec parcimonie et au bon moment les événements, de ménager le lecteur tout en l’entrainant toujours plus loin dans une histoire qui devient démente, mais qui se tient ! Il n’y a pas de véritable moment calme, ou alors, l’envie de savoir vient les troubler.
Les personnages, Singleton et Trelawney, sont présents dans plusieurs livres de Bourland, donc je ne vais pas trop m’avancer à leur sujet. Ceci dit, ils me plaisent bien : différents, mais complémentaires, sans jouer le « bon » et le « mauvais » flic, juste deux hommes, amis, curieux. Ils font des erreurs qui servent l’aventure en restant tellement naturels que rien n’apparait surfait chez eux. On s’y attache volontiers parce qu’ils disposent d’une légèreté qui donne envie de les suivre.
Donc, peut-être que tous les autres livres de cet auteur me déplairaient, mais en attendant celui-ci avec son ambiance, ses décors et surtout, ses protagonistes et ses références au cinéma d’épouvante des années 30 m’a absolument convaincue ! Coup de cœur officiel dans la catégorie polar !
A découvrir aussi
- Moi et ce Diable de Blues, de Richard Tabbi & Ludovic Lavaissière aux éditions du Riez
- Maraudeur, de Laurent Fétis, aux Editions Lokomodo, juin 2013
- Rob Smith Tom, Enfant 44, aux Éditions Belfond (5 février 2009)
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 21 autres membres